Réparation de cartes et puces : une piste pour une électronique plus verte

Sylvain Dulphy, directeur commercial pour l’Europe de Finetech, qui fabrique des équipements de réparation, estime que l’électronique est particulièrement concernée par les problématiques de durabilité et d'efficacité des ressources.

  • par Finetech
  • 12 décembre 2024
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  • Sylvain Dulphy, directeur commercial pour l’Europe de Finetech.
    Sylvain Dulphy, directeur commercial pour l’Europe de Finetech.

Ce n’est pas un secret : l’électronique est extrêmement gourmande en ressources naturelles et génère une quantité considérable de déchets électroniques. Mais elle joue aussi un rôle fondamental dans notre société actuelle. Les acteurs majeurs du secteur doivent ainsi s’atteler à réduire leur impact sur l’environnement. Mais comment ? Et est-ce que réparer est une option ? L’électronique connaît une croissance exponentielle due à des progrès considérables pour la médecine, la sécurité, l'enseignement et le développement des connaissances, et bien sûr un meilleur contrôle de nos dépenses énergétiques. L’enjeu environnemental prend donc de l’ampleur chez les acteurs du secteur : la production de puces sophistiquées de 2 nm nécessite au moins deux fois plus d’eau et trois fois plus d’électricité que celle de puces de 28 nm.

Intégrer l’économie circulaire à la production de modules électroniques et à l’assemblage de cartes électroniques implique de concevoir des produits durables, favoriser la réutilisation des composants et optimiser les processus de fabrication. Plusieurs stratégies existent pour y parvenir. Celles qui nous viennent spontanément en tête concernent la phase de fabrication : il paraît évident d'intégrer des matériaux recyclés dans les composants, ou d’optimiser le processus avec des technologies permettant de consommer moins d’électricité et de maximiser l’usage des matières. Le recyclage, en fin de vie du produit, est aussi un axe qui se développe. Toutes ces solutions sont évidemment intéressantes, mais ont aussi leurs limites : les coûts élevés d’investissements initiaux, le risque d’une perte de qualité des produits ou la remise en cause du processus de fabrication existant.

 

La réparation des cartes électroniques

 

La réparation ou « rework » apporte une autre solution. Cela consiste à réparer des cartes électroniques défectueuses ou obsolètes pour leur donner une seconde vie. Pratiquement toutes les pièces d’un circuit électronique y sont éligibles, des composants passifs comme les résistances et les condensateurs, aux composants actifs comme les puces et les transistors, estime Sylvain Dulphy, directeur commercial pour l’Europe de Finetech. À condition d’avoir les bons outils, la plupart des procédés de montage d’une carte électronique peuvent potentiellement être repris en réparation : le dessoudage ou ressoudage pour retirer ou remplacer des éléments, le « rebonding » (le rétablissement des liaisons) pour réparer des liaisons défectueuses, le remplacement ou la réparation du packaging.

 

Outils de réparation : la température maîtrisée

 

Mais concrètement, comment procède-t-on à la réparation ? De nombreux outils apportent la précision et la qualité d’intervention exigée pour remettre à neuf des cartes électroniques déjà montés sans endommager leurs composants. La problématique principale demeure la température : certains composants ne supportent pas la chaleur, qui doit être parfois ciblée, et la plupart des composants ne peuvent subir qu’un nombre de cycles de refusion limité pour rester fiables. Le « rebonding » ultrasonique, par exemple, ne nécessite pas de chaleur élevée, ce qui réduit le risque de surchauffe de certains éléments. La simple refusion d’une soudure peut aussi être précise et épargner les composants adjacents, grâce à la soudure par laser. Sur tous ces points sensibles, des équipements performants existent pour rendre possible et accessible ce travail minutieux.

 

Une solution simple, flexible et immédiate !

 

La réparation gagne à être développée en priorité dans le sens où il réduit immédiatement les déchets en prolongeant la vie de composants et d’assemblages existants, sans remise en cause des infrastructures de production existantes. Sur le plan économique, la réparation s’avère souvent plus rentable que le recyclage des matériaux ou la mise en place de systèmes de collecte de déchets électroniques.

En effet, si l’investissement de machines ou d’outils de réparation a un certain coût, les compétences nécessaires à leur utilisation existent déjà en interne, et les opérations quotidiennes ne nécessitent pas d’infrastructure logistique particulière. En outre, la réparation se révèle extrêmement flexible et adaptable à plusieurs égards :

- la modularité : des modules sont interchangeables pour réaliser les différentes tâches de réparation,

- la programmation pour personnaliser les processus en fonction des besoins et assurer la reproductibilité des résultats : paramètres de température, de temps, de force,

- la variété des composants réparables : des microcomposants aux plus grands modules de circuits imprimés destinés à tous les secteurs d’activité.

Les techniques de réparation dépassent le simple cadre du recyclage : elles peuvent servir à l’amélioration d’un prototype et contribuer à une R&D plus vertueuse.

De la même manière, il est possible d’anticiper de potentielles améliorations techniques des coomposants. Tout comme il était commun d’ajouter des barrettes mémoire dans un PC, il devient possible d’enrichir les puces avec des composants soudés, voire des modules fonctionnels qui pourront être remplacés au fil des ans par des générations plus performantes.

 

Envisager la réparation comme un « business model »

 

Depuis de nombreuses années, la réparation de systèmes électroniques se fait majoritairement via le remplacement des cartes électroniques, une solution plus simple, moins coûteuse et qui évite le diagnostic précis des dysfonctionnements. Cependant, on observe aussi le développement d’une approche consistant à réparer les cartes électroniques en remplaçant uniquement les composants défectueux, notamment pour des cartes obsolètes. Un modèle économique basé sur le remplacement de composants commence ainsi à émerger.

L’un des principaux défis de cette méthode est de pouvoir qualifier les produits réparés. Grâce à la précision et au contrôle des processus des machines actuelles, il est désormais possible de garantir la répétabilité et la traçabilité des réparations, et de répondre ainsi à cette exigence de qualité. La réparation n’est donc pas une simple solution technique pour pallier la pénurie de composants ou de cartes électroniques : il doit être envisagé comme une véritable opportunité économique.

Parmi les dispositifs mobilisables pour rendre la microélectronique plus verte, la réparation de cartes électroniques se distingue donc comme une solution simple à déployer et porteuse de bénéfices très concrets mesurables à court terme. Sa flexibilité représente une grande force pour s’adapter rapidement aux exigences et innovations d’un marché en constante croissance.

Journaliste business, technologies de l'information, usine 4.0, véhicules autonomes, santé connectée

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