Universal Robots s'est développé rapidement ces dernières années malgré un contexte économique difficile. Pouvez-vous nous retracer son historique et les spécificités des cobots par rapport aux robots traditionnels ?
Jocelyn Peynet : Le groupe Universal Robots a été créé en 2005 par des étudiants danois qui souhaitaient proposer des robots polyvalents, flexibles, simples d’utilisation et d’installation, y compris pour des non spécialistes de la robotique afin d’automatiser la production dans les usines. Les premiers cobots, radicalement différents des robots traditionnels sont alors nés en 2008. Plusieurs grands comptes automobiles y ont trouvé de l’intérêt et les ont installés sur leurs lignes de production pour automatiser les postes de travail. Leur construction et les composants qu’ils utilisent rendent les cobots non intrusifs. Ils utilisent des tubes en aluminium à la place de la fonte pour les robots traditionnels. Les interfaces de programmation sont plus simples. Les servomoteurs intégrés dans les articulations du cobot sont plus compacts. Ils manipulent des charges jusqu’à 20 kg. Les cobots s’arrêtent en maîtrisant leur force et leur vitesse, et de ce fait, sont conçus pour être utilisables près des opérateurs. Dans les opérations de palettisation par exemple, ils ne présentent pas de risques et peuvent être placés dans des enceintes complétement ouvertes.
En quelques chiffres clés, quelle est l'importance du groupe Universal Robots à l'international : chiffre d’affaires, nombre de salariés, de sites de production, force de vente… ?
Jocelyn Peynet : Universal Robots possède 40% à 50% de part de marché de la cobotique et a créé un véritable écosystème autour de son siège d’Odense, au Danemark, où tous les robots sont produits pour le monde entier. Nous avons à ce jour plus de 50000 cobots installés. Des centaines de sociétés se sont créées à proximité pour développer et vendre des accessoires de robots, ainsi que des campus universitaires où les étudiants sont encouragés à aller vers une spécialisation en robotique. Le chiffre d’affaires du groupe a atteint 326 M$, soit 308 M€ en 2022, avec une croissance de 12% malgré les difficultés d’approvisionnement en composants électroniques et la guerre en Ukraine. 50% des ventes sont réalisées en Europe, 25% en Asie et 25% aux Etats-Unis. Le groupe emploie environ 1000 salariés avec un modèle de ventes indirectes quasiment à 100%. Nous avons une force commerciale externe impressionnante avec 800 partenaires dans le monde. Sur le territoire français, outre notre équipe qui compte une dizaine de personnes, nous avons 6 partenaires distributeurs, représentant plusieurs dizaines de commerciaux et techniciens à proximité de n’importe quelle entreprise française, et 17 intégrateurs capables de répondre aux besoins clés en main des clients. Universal Robots dispose de 20 bureaux de ventes couvrant 40 nationalités en Europe, aux Etats-Unis et en Asie.
Avez-vous souffert des problèmes d’approvisionnement en composants électroniques et vos délais de livraison ont-ils été allongés ?
Jocelyn Peynet : En 2015, le groupe a été acquis par l’Américain Teradyne, acteur majeur dans le domaine des équipements de test pour l’électronique, ce qui nous a donné davantage de moyens. Nous avons pu continuer à livrer nos robots en deux semaines, et grâce aux relations privilégiées que Teradyne entretient avec les fabricants de semi-conducteurs, nous n’avons pas éprouvé beaucoup de perturbations liées aux difficultés d’approvisionnements en composants électroniques. Nous bénéficions également de sa puissance d’achats. Nous avons standardisé au maximum nos robots, ce qui nous permet d’être efficace en termes de production et de stocks.
Universal Robots répond aux attentes et aux exigences de nombreuses industries. Comment son offre évolue-t-elle ?
Jocelyn Peynet : Notre offre a évolué récemment vers des charges utiles jusqu’à 20 kg et des rayons d’action plus importants. L’UR20 se déplace dans un rayon d’action de 1750 mm, contre 1300 mm pour la précédente génération, et nous allons évoluer encore vers d’autres tailles. La commercialisation de l’UR20 a débuté en septembre 2022 avec l’ouverture des précommandes, et nous allons commencer à le livrer dans le milieu de cette année, principalement pour des applications de palettisation dans l’agroalimentaire, la pharmacie, la logistique, le soudage. Les logiciels et les interfaces sont mis à jour régulièrement avec des fonctionnalités permettant une intégration plus rapide et plus facile. Nous avons également revu la partie électronique et mécanique de nos cobots, les moteurs, les réducteurs, les logiciels, et créé une plateforme comparable à l’Apple Store pour développer des accessoires et des outils compatibles avec nos robots. Plus de 400 partenaires proposent des produits sur étagère dédiés à cette plateforme, pour simplifier l’utilisation de nos robots.
Comment analysez-vous le marché de la cobotique et quels sont vos objectifs à moyen terme sur le marché national ?
Jocelyn Peynet : Le taux de croissance de la cobotique devrait être de 20% à 30% dans les années à venir. Beaucoup de TPE et de PME sont agréablement surprises par nos capacités d’intégration. Il y a par exemple une pénurie de main d’œuvre dans le domaine du soudage avec 6000 postes à pourvoir en France, et nos cobots peuvent d’ores et déjà répondre à ces besoins à la place d’un personnel qualifié que les entreprises ne trouvent pas sur le marché. Cela permettra de maintenir une production industrielle en France. Nous pouvons aussi coupler nos bras de robots aux robots mobiles autonomes (AMR) de la société MiR qui est également née à Odense et qui a été acquise par Teradyne en 2018.