Les industriels de la mécatronique, représentés par le syndicat Artema, sont doublement concernés par l'Usine du futur, que ce soit pour leurs propres usines ou leurs nouveaux produits communicants. Bruno Grandjean, Président d'Artema qui vient d'être élu Vice-Président de la Fédération des Industries Mécaniques est d'ailleurs très impliqué dans le dossier " Industrie du Futur " pour la FIM. Il a bien voulu répondre à nos questions.
Pouvez-vous tout d'abord nous rappeler que représente le syndicat Artema ?
Bruno Grandjean : Artema est le syndicat professionnel représentant les industriels de la Mécatronique. Il rassemble plus de 150 entreprises adhérentes : fournisseurs de composants, de solutions et de systèmes dans les domaines de l'étanchéité, des transmissions hydrauliques, mécaniques et pneumatiques, des roulements et guidages linéaires, de la mécatronique, et désormais des fixations. Ces activités représentent 7,2 milliards de volume d'affaires dont 50% à l'export, et environ 35 000 emplois.
A une époque où la modernisation de nos usines est essentiellement pour la survie de notre industrie, que représente vraiment pour vous le concept de l'Usine du Futur ?
Bruno Grandjean : En annonçant le regroupement des 34 plans de La nouvelle France industrielle, en neuf grandes solutions industrielles autour du programme Industrie du futur, Emmanuel Macron, ministre de l'Économie, place l'industrie au coeur du redressement économique de la France. Une deuxième chance à ne pas manquer pour l'Hexagone car, comme le fait remarquer Emmanuel Macron, " la France a raté dans les années 90 la vague d'investissements qui a été celle de la robotisation. On se retrouve aujourd'hui avec cinq fois moins de robots en France qu'en Allemagne, deux fois moins qu'en Italie... Est-ce que c'est cela qui a protégé l'emploi industriel ? Non, parce que la première décennie des années 2000 a montré l'effondrement de l'emploi industriel ". Ce redressement passe par une modernisation des outils de production, pour gagner en compétitivité. C'est tout l'objet de l'usine du futur, une usine interconnectée, flexible, agile, pour répondre à des besoins de plus en plus spécifiques des clients. Ce qui est possible par le développement des technologies de l'information et de la communication, ainsi que du numérique. Mais l'usine du futur n'est pas qu'un concentré de nouvelles technologies. C'est aussi une usine respectueuse de l'environnement, insérée dans le tissu économique local. Surtout, l'être humain y occupe une place centrale au coeur des processus. " Une dimension humaine essentielle, qui distingue l'usine du futur à la française de l'industrie 4.0 développée par nos collègues d'Outre-Rhin " comme le rappelle souvent Laurence Chérillat, Déléguée Générale du syndicat Artema.
Artema est très impliqué dans le programme Industrie du Futur. Pouvez-vous nous préciser ses actions pour ce programme ?
Bruno Grandjean : Pour mettre en place le programme industrie du futur, qui prévoit d'accompagner les projets d'investissements de 2 000 PME, la FIM, à laquelle Artema est affiliée et d'autres partenaires ont créé l'association " Alliance pour l'Industrie du Futur ". De plus, Artema est membre du comité de pilotage " Usine du futur " de la FIM et participe ainsi à l'élaboration du guide pratique de l'Usine du futur. La première partie de ce guide accessible sous peu est consacrée aux enjeux et aux solutions pour aider les PME. La seconde partie du guide sera constituée de fiches didactiques pour les entreprises : fabrication additive, robotique, marketing client, relation BE/production.... Au sein de l'Alliance pour l'Industrie du Futur, Artema apporte son expertise à la FIM qui représente également le syndicat. Bruno Grandjean, président d'Artema et Vice-président de la FIM est d'ailleurs l'un des porte-parole de la Fédération sur le sujet.
Quelle est la place de la mécatronique dans le développement de l'Industrie du Futur ?
Bruno Grandjean : Les technologies mécatroniques sont au cœur de l'usine du futur : les machines deviennent capables de s'auto diagnostiquer et de dialoguer avec les autres composantes de la ligne de production. L'usine du futur s'appuie sur des systèmes mécatroniques permettant d'analyser des données en temps réel pour améliorer la qualité de la production ou optimiser la maintenance. Parce qu'elle donne de l'intelligence aux équipements industriels, la mécatronique occupe une place centrale dans les lignes de fabrication de l'usine du futur, basées sur le "plug and play". Présente dans les nouvelles technologies, telles que la fabrication additive, elle permet d'optimiser la maintenance et joue un rôle essentiel en matière d'efficacité énergétique. Parmi les technologies appelées à se développer dans l'usine du futur, la robotique occupe une place de choix, avec des robots de plus en plus indépendants appelés à travailler avec l'homme. Ce qui suppose d'introduire de l'intelligence dans les différents composants et donc le développement de la mécatronique. Car sans mécatronique, pas de robotique. Les deux disciplines sont souvent confondues, et pour cause : elles sont intimement liées et s'enrichissent l'une et l'autre. En matière d'intelligence, le robot est l'un des produits finis les plus aboutis et la robotique l'un des secteurs clients les plus importants de la mécatronique. Capteurs, actionneurs, réducteurs..., dans un robot, on retrouve à peu près tous les produits ou sous-ensembles de la mécatronique.
Vous êtes non seulement Président d'Artema mais également Président de Redex, Leader européen en ingénierie et fabrication mécanique de haute précision. Comment appréciez-vous l'implication des industriels de la mécatronique dans ce changement industriel ?
Bruno Grandjean : Les adhérents d'Artema, en tant qu'industriels, sont aussi concernés par la modernisation de leurs outils de production. Un certain nombre d'entre nous sont en avance et peuvent faire bénéficier les autres de leur expérience en témoignent les nouvelles usines mises sur pied par nos adhérents, telles que celles de SEW Usocome, de NTN-SNR, de A.Raymond ou encore de Trelleborg Sealing Solution pour ne citer que les exemples les plus récents. En ce qui concerne Redex, ces dix dernières années, nous avons consacré plus de 15 millions d'euros à la modernisation de trois usines (deux en France, une en Allemagne). Pour faire face à des volumes de commandes croissants, garantir la qualité, les délais et réduire les coûts, il était indispensable de moderniser notre outil de production.